C’était demain !
De ŒHMICHEN à AVIONS MAUBOUSSIN

Merci à Pierre Lamard, professeur d’histoire industrielle au pôle « Humanités » de l’Université de Technologie de Belfort-Montbéliard, pour la réalisation du volet historique de cet article.
Questions d’énergie pour la maîtrise de l’air
Étienne Œhmichen (1884-1955), pionnier du vol stationnaire
Issu par sa mère de l’élite protestante montbéliardaise, Étienne Œhmichen (1884-1955), ancien élève du collège Cuvier, est diplômé de l’École Centrale des Arts et Manufactures (1908). L’ingénieur marque rapidement par sa créativité technique comme en atteste son parcours à la Société Alsacienne de Construction Mécanique, qui devient Als.thom en 1928, puis comme sous-directeur des Usines Peugeot à Beaulieu et Valentigney. 12 brevets Peugeot-Œhmichen appliqués aux techniques de l’automobile sont déposés.
Durant la Première Guerre mondiale, il est rapidement affecté au ministère des Inventions où il travaille, entre autres, à la mise au point d’un char d’assaut et d’un stroboscope électrique. Mais, il reste avant tout l’homme de la maîtrise du vol vertical.
Dès 1919, revenant à ses premières préoccupations, il dépose un brevet de perfectionnement aux hélices propulsives et sustentatrices, s’inspirant de l’observation méthodique du vol des oiseaux et des insectes, d’où il élabore une théorie sur la récupération de l’énergie dans les fluides.
Une première mondiale en 1924 à Valentigney (lieu-dit Les prairies d’Arbouans)
Étienne Œhmichen peaufine sa première machine dans un hangar du village de Valentigney, véritable laboratoire d’essais, financé en partie par « Les fils de Peugeot-Frères ». À quelques dizaines de mètres de là, le 15 janvier 1921, c’est le premier vol stationnaire d’un engin emportant pendant une quinzaine de secondes un homme à deux mètres du sol aidé par un ballonnet gonflé d’hydrogène frais pour la stabilité. Le 4 mai 1924, Étienne Œhmichen effectue le premier vol au monde d’un kilomètre en circuit fermé à bord du prototype n° 2. Le succès de cinq autres appareils, le dépôt de nouveaux brevets… et quelques déboires à l’atterrissage, lui ouvrent en 1939 une chaire au Collège de France sous le titre « Mécanique animale appliquée à l’aviation » qu’il nomme « Chaire d’aéro-locomotion mécanique et biologique ». Si l’inventeur ne s’est pas mué en industriel, en revanche tous les constructeurs d’hélicoptères s’inspirent des principes découverts et des dispositifs mis au point par Étienne Œhmichen.
Au XXIe siècle, un autre saut technologique s’apprête à être franchi, toujours dans le domaine aéronautique…
L’histoire continue de s’écrire aujourd’hui avec un ingénieur X Supaéro, passionné depuis l’enfance par tout ce qui vole dans les airs et qui décide de redonner vie à une marque pionnière de l’entre-deux-guerres tombée dans l’oubli : Avions Mauboussin.
Dessine moi… un avion avec Avions Mauboussin
C’est en 2011 que David Gallezot acquiert les droits d’Avions Mauboussin pour en faire l’écrin d’un projet d’avion innovant, l’Alérion m1h. Et en 2017 qu’il se pose en Nord Franche-Comté, séduit par l’écosystème local et les perspectives de partenariats technologiques avec l’Université de Technologie de Belfort-Montbéliard.
L’expert aéronautique a en effet en tête un concept d’avion léger biplace tandem looké chasseur à propulsion hybride, décollage ultra-court et structure en composites naturels.

Alérion, l’air du futur
Si on ne parle pas de vol vertical à proprement parler, l’Alérion saura décoller en moins de 100 mètres, depuis une pelouse ou un parking : le tout en mode électrique, sans bruit ni émissions, lui permettant d’accéder au cœur des zones urbanisées. La motorisation thermique prendra le relais en vitesse de croisière, conférant une autonomie de plusieurs centaines de kilomètres. L’engin volant se positionnera ainsi comme une offre innovante de transport rapide et écologique de centre-ville à centre-ville, qui intéresse tant une clientèle de pilotes-propriétaires que le marché naissant de la mobilité à la demande.
Zéphyr, un souffle d’hydrogène
Une telle prouesse est le fruit d’une optimisation de chaque élément de l’avion, qui a été doublement repensé selon le meilleur de l’état de l’art aéronautique et à l’aune des principes du développement durable…
L’une de ces briques technologiques porte le nom de Zéphyr, une propulsion hybride rechargeable, simple, légère et robuste, qui sera déclinée en version hydrogène. Une innovation rendue possible au travers d’une collaboration active avec les nombreux acteurs académiques et industriels de la filière hydrogène en Nord Franche-Comté.
L’Alérion m1h sera le premier-né d’une gamme d’appareils déclinés en diverses tailles et usages. Le prototype devrait être achevé d’ici quelques mois pour un vol inaugural attendu en 2022. Avec l’objectif d’être le premier avion à propulsion hydrogène certifié.
L’envol des pionniers. D’Œchmichen à Avions Mauboussin des temps modernes, le Nord Franche-Comté démontre qu’il peut être un territoire où se réalisent nos rêves d’enfants et les plus belles prouesses mêlant innovation, technologies et talents locaux.
« Les baobabs, avant de grandir, ça commence par être petit. » Le Petit Prince – Antoine de Saint-Exupéry