C’était demain !
De KÉGRESSE à GAUSSIN

De KEGRESSE à GAUSSIN

Merci à Pierre Lamard, professeur d’histoire industrielle au pôle « Humanités » de l’Université de Technologie de Belfort-Montbéliard, pour la réalisation du volet historique de cet article.

La mobilité techniquement renouvelée

Adolphe Kégresse, un inventeur très productif

Né à Héricourt en 1879, Adolphe Kégresse termine sa formation à l’École pratique de Montbéliard en 1895. L’établissement s’avère dès sa création un lieu d’excellence professionnelle dont le recrutement s’étend jusqu’à Belfort. Il fournit au tissu industriel local les compétences techniciennes nécessaires au développement de la construction automobile et de la construction électrique. Tous les grands noms siègent au conseil de perfectionnement (Peugeot, Japy, Rossel, Schwander, Dolfuss, Ziegler…).

Adolphe Kégresse

Adolphe Kégresse, diplômé emblématique de l’École, travaille tout d’abord chez le constructeur automobile local Jeanperrin, avant d’entrer en 1906 au service du tsar Nicolas II. Il est rapidement nommé directeur technique des « services automobiles impériaux » et dépose un brevet baptisé « traîneau automobile » qu’il adapte à des véhicules capables désormais de se déplacer facilement sur la neige. L’armée russe commande à plusieurs centaines d’exemplaires des ambulances, des automitrailleuses, des voitures d’État-major… équipées d’autochenilles.

De retour en France après la révolution de 1917, il s’associe par l’intermédiaire de Georges Schwob d’Héricourt, au polytechnicien Jacques Hinstin, proche d’André Citroën et propriétaire de la marque automobile Grégoire. Il met au point à partir de 1920 de nouveaux brevets sous le nom « Kégresse-Hinstin ». L’un devient directeur technique du département des autochenilles Citroën, l’autre directeur commercial. Plusieurs marques acquièrent les droits d’exploitation de la propulsion par chenilles (Renault, Schneider, SOMUA, Unic, Burford, Crossley, Alfa Roméo…). Celle-ci fait surtout l’immense succès des grandes croisières jaunes et noires du constructeur aux chevrons, qu’Adolphe Kégresse quitte au moment de son rachat par Michelin en 1935.

KEGRESSE autochenille -Croisière Jaune Citroën

Crédits photos : Charles Mathiot – Roger Boigeol – DR

Il poursuit ses recherches et sera le « père » de la boîte 4 vitesses à double embrayage, du dispositif de changement de vitesses hydro-mécanique automatique dénommé « AutoServe ». En 1939, il met au point une chenillette filoguidée à propulsion électrique. Au cours de son existence Adolphe Kégresse dépose près de 45 brevets en rapport avec la locomotion automobile.

Quelques années plus tard, c’est toujours à Héricourt, qu’une autre forme de mobilité s’apprête aujourd’hui à révolutionner « le monde » de la logistique…

Gaussin, ruptures et pérennité

C’est au début des années 2000 que l’entreprise familiale de remorques industrielles fondée à la fin du XIXe siècle à Héricourt entame une métamorphose radicale… qui se poursuit depuis à un rythme très dynamique.

Penser les outils au service de la mondialisation du commerce

L’homme-orchestre de cette révolution permanente, c’est Christophe Gaussin, successeur d’une lignée d’entrepreneurs francs-comtois et héritier d’un ADN visionnaire et pionnier. Il pressent qu’à l’ère de la mondialisation, le trafic mondial de marchandises va exploser. Il redéploie alors le savoir-faire de son entreprise sur le marché des engins roulants de manutention des containers pour les installations portuaires.
Et finit par se tailler de solides positions à l’international dans ce secteur confidentiel et en plein essor qu’est la manugistique. Viendra un peu plus tard la déclinaison pour l’aéroportuaire, sans oublier désormais les engins dédiés à la logistique entrepôt ou industrie.

Crédit photo : Gaussin

Crédit photo : Gaussin

Crédit photo : Gaussin

Crédit photo : Gaussin

L’innovation comme ADN

C’est ainsi que naît, à Héricourt, une gamme complète de véhicules électriques, puis hydrogène, dont l’architecture globale intégrant un design moderne couplé à un système powerpack modulaire est également étudiée en Nord Franche-Comté. Dernière innovation en date mais lancée en… 2013… le système de navigation autonome qui équipe désormais les best-sellers du catalogue maison, avec leur ligne si particulière… sans cabine.

Acteur de la logistique décarbonée

Next step : Gaussin s’intéresse effectivement de près à la mobilité hydrogène, inspiré par les avancées technologiques en cours d’expérimentation dans le Nord Franche-Comté. C’est ainsi qu’à l’automne 2020, l’entreprise présente en avant-première mondiale dans ses ateliers d’Héricourt les stars « ATM-H2 », destiné aux centres logistiques, et « APM-H2″, un colosse dédié au portuaire d’une capacité de traction de 75 tonnes. Le printemps 2021 célèbre l’arrivée du Zero-emission Yard Automation, un tracteur 100 % hydrogène et autonome, équipé d’un bras robotisé.

Crédit photo : Gaussin

Crédit photo : Gaussin

Depuis, les annonces se succèdent : partenariats technologiques, joint-ventures et alliances commerciales… Christophe Gaussin ne cache pas son ambition de partir à la conquête des entrepôts du village planétaire… depuis son épicentre, à Héricourt en Nord Franche-Comté.

Depuis des siècles, les inventeurs et les innovations majeures jalonnent l’histoire du Nord Franche-Comté qui continue, chaque jour à imaginer les solutions de notre futur. De Kégresse à Gaussin l’innovation est le trait d’union, le dénominateur commun, l’ADN partagé. C’est cette même innovation qui fait encore aujourd’hui du Nord Franche-Comté un territoire si particulier aux yeux des industriels et des investisseurs car il s’y cultive un des facteurs clés de succès de l’innovation : l’homme.

« Ce n’est pas en améliorant la bougie qu’on a inventé l’ampoule électrique. » Citation attribuée à Niels Bohr